L’enquête publique : exercice vertueux de démocratie ou combat – malheureusement très inégal - contre l’Administration ?

30 Décembre 2022

Lorsque les habitants de Cahaignes, qui dans leur grande majorité n’avaient évidemment pas lu les 600 pages du dossier sur le site de la Préfecture, sont venus dire au commissaire-enquêteur, avec leurs mots à eux, toute leur colère et tout le mal qu’ils pensaient de ce projet de trou béant qu’on voulait leur mettre au bout de leurs jardins, ce dernier, un ancien responsable des ressources humaines de l’Armée, nommé par le tribunal administratif pour piloter l’enquête publique, les accueillit en leur vantant la qualité du dossier de Terreal, les avis favorables déjà donnés par l’Administration, les autres carrières de la région, … bref, leur fit comprendre que la carrière serait créée car la société Terreal avait rendu un dossier selon lui conforme à la virgule près aux règlements concoctés par l’Administration et parce que le Préfet suivrait évidemment son administration.

 

Peu semblait lui importer alors, au commissaire-enquêteur, que ledit projet de carrière soit prévu à cinquante mètres des premières maisons d’un paisible village, que le parcours des camions soit censé le traverser sur une route de campagne longeant des aires de jeux d’enfants, que le stockage d’argile soit prévu sur une zone humide, havre de biodiversité ou que la proximité de la carrière ait pour effet de dévaloriser les maisons des riverains, souvent fruit du travail de toute une vie. Le dossier était pour lui impeccable, les paragraphes bien rangés, les photos dans le format exigé..

 

Jusqu’à ce qu’une réunion publique, censée permettre à Terreal de présenter son projet mais bizarrement organisée dans les derniers jours du temps imparti pour l’enquête, vienne rebattre les cartes et montrer, devant des élus et journalistes locaux qui n’en croyaient pas leurs yeux, à quel point le dossier bien rangé n’était qu’une illusion. Sous la pression d’une salle déterminée à exiger des réponses à ses questions précises, l’équipe-projet de Terreal explosa en vol, perdant le fil de ses approximations, de ses affirmations sans preuve, de ses omissions voire de ses mensonges, et la réalité d’un dossier indigent et inapproprié sur le fond éclata au grand jour.

 

                                                    

 

L’enquête fut prolongée de 15 jours. Et les élus se mobilisèrent. Le conseil municipal de la commune vota à l’unanimité une délibération contre le projet. Deux des quatre communes voisines consultées avaient déjà donné des avis défavorables audit projet, les deux autres les imitèrent. L’agglomération, à laquelle personne bizarrement n’avait demandé son avis le donna, sous forme d’une contribution à l’enquête publique au vitriol. Le député, les sénateurs ne furent pas en reste…

 

Eh bien, que pensez-vous qu’il arriva ? Dans la torpeur d’un 15 août, le commissaire-enquêteur rendit un avis de huit pages dans lequel il expliqua doctement que, certes « la demande d’autorisation, telle que présentée à enquête publique, ne pourrait recevoir qu’un avis défavorable de sa part» mais qu’il estimait néanmoins que, compte tenu des circonstances, et en particulier des efforts consentis par Terreal, « de sa volonté de rester à l’écoute », « de sa détermination à chercher les meilleures solutions », il lui revenait de suggérer une enquête publique complémentaire et qu’il donnait, en tout cas, un avis favorable au projet.

 

Consolation quand même pour les opposants au projet, soit la presque totalité du village, cet avis favorable était assorti de réserves visant à « optimiser l’éloignement du front d’exploitation » (?!?!?) et à "proposer une alternative" pour le parcours des camions.

 

On apprit plus tard, auprès des fonctionnaires réputés avoir donné un avis favorable au cours de l’instruction qui avait précédé l’enquête publique, qu’il ne s’agissait pas d’un avis favorable sur le dossier en lui-même mais simplement sur sa « recevabilité » en vue du lancement de l’enquête publique.

 

Quel souvenir garderont les habitants de Cahaignes de leur enquête publique ? Sans doute que les jeux étaient faits d’avance. Triste conclusion d’un exercice de démocratie…

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